Benoît Mennesson

Carnet de voyage…

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Séjour à St-Pierre et Miquelon

du 12-09-2011 au 18-12-2011
Ça pourrait être un navire, en provenance de la vielle France et en direction de la nouvelle, perdue entre temps, maintenant on dit le Canada. Un coup manqué, tans pis, on restera là. Un gros navire de pierre, qui s’est enlisé, la verdure a bien fini par pousser, et des maisons multicolores autour, dans lesquelles habitent les marins sédentarisés. Loin de la mère patrie, on sent déjà le vent des Amériques. Autour, les comptoirs de commerces européens et les places fortes ont grandi, prospéré, maintenant ce sont des villes immenses, et les drapeaux ont changés. Ici, la vie a pris son temps, l’explosion de la croissance s’est étouffée, manque de place, mais on l’a gardé, notre beau drapeau français. Un petit coin de France du bout du monde qui, si l’on vient directement de la métropole, peut paraître complètement différent, et si l’on vient du Canada, donne l’impression de retrouver la France. Tout se mélange, les accents, les expressions, les produits du commerce. On dit pas « merci » mais « thanks », on dit pas « ça va ? » mais « ça dit ? », on dit pas « merde » mais « chrisss ». Le bacon rond qu’on trouve en France, ici c’est pas du bacon. Et celui qu’on trouve en abondance, comme partout en Amérique du nord, ressemble à de la poitrine fumée. Je découvre ici les chaînes de télévisions américaines (et les pages de pubs incessantes), ce qui me permet de perfectionner un peu mon anglais by the way. En arrivant dans ce microcosme, je trouvais ça agaçant. C’est fréquent qu’une boulangerie, ou autre commerce, n’ait pas d’écriteaux qui signale que c’en est une, il faut le savoir. Même à l’hôpital, y a rien qui indique l’entrée de l’accueil ou des urgences. Ma puce de téléphone fonctionne partout dans le monde sauf ici, etc. Alors pour trouver du travail, c’est pas facile non plus, les gens se connaissent, se tuyautent entre eux et connaissent les entreprises qui pourraient les embaucher. Bon, je touche du bois, malgré que c’était presque la fin de la saison de travail (puisqu’on ne travaille pas l’hiver à cause des conditions climatiques), j’ai réussi à trouver assez rapidement et à faire mes preuves pour qu’on me garde jusqu’à la fin de la saison, mais j’ai dû frapper à un paquet de portes. Ici, pas de Mc Donald, aucune grande enseigne française, même les banques et compagnies d’assurances sont toutes des sociétés locales. Mais en fin de compte, tout ça participe au caractère vraiment particulier de l’archipel, à son aspect très pittoresque et tranquille. Et je me rends compte que j’ai atterri dans une toute petite île perdue, sur laquelle je vais rester plus de trois mois. Quand on part faire le tour du monde et qu’on est grand amateur de grandes villes comme moi, on se dit tout de suite qu’on a fait une grosse bêtise. Et le temps passe et on apprécie cette atmosphère particulière, ces gens adorables et cette vie tranquille. Et au niveau des activités de détente, j’étais pas mécontent non plus de trouver une bibliothèque assez bien fournie et surtout une zone relativement vaste pour faire des randonnées. À une demi-heure de marche du centre ville, on se retrouve déjà en pleine nature. C’est assez montagneux, pas beaucoup d’arbres sauf autour des lacs ou en bord de mer (c’est le seul endroit en France où l’on trouve des forêts boréales), ça m’a beaucoup rappelé mes grandes expéditions en Norvège. Et puis je descends une petite rivière encombrée d’arbres couchés et de branches basses. J’arrive à l’embouchure, face à l’océan et l’île de Langlade au loin derrière la brume. La descente a été si laborieuse que, pour changer, je m’imagine remonter par un flanc un peu escarpé mais qui semble avoir un ou deux petits passages grimpables. Et puis, en Norvège, j’avais fait bien pire et avec mon sac de 25kg et ma tente sur le dos en prime. Et en grimpant je me rends compte que la roche est assez friable, avec l’humidité de la brume qui se colle partout et rends les pierres un peu glissantes, je décide de faire demi-tour. En me retournant, un morceau de pierre à laquelle je m’agrippait me reste dans la main, ceux sur lesquels mes pieds étaient posés s’éboulent. En tombant je heurte une pierre qui m’éjecte vers le vide et je fais une chute libre de deux ou trois mètres. J’ai eu beaucoup de chance de retomber droit et sur un amas de petits cailloux. Mes mains saignaient un peu, j’avais peur d’avoir une côte cassée, en fin de compte j’ai juste une longue trace brune qui me reste encore sur le flanc droit où j’ai heurté la roche. En tout cas, ça aura été une bonne leçon pour moi. Aucun réseau téléphonique et, dans cet endroit renfoncé, avec la brume, j’aurais pu attendre un moment avant d’avoir du secours si j’avais eu même une jambe cassée. En tout cas, ce séjour ne sera pas du temps de perdu ! Déjà car le travail est bien payé ici, ce qui me permet de bien renflouer mon compte en banque. Je m’habitue un peu aux habitudes de travail du Canada car les sections de bois et les dimensions des panneaux de construction, par exemple, sont toutes aux normes du Canada, puisque tout est importé de là-bas. Bon, le Canada, ça risque d’être compromis puisque j’ai loupé le coche de l’ouverture de la session des visas vacances-travail cette année, mais c’est toujours ça de pris au cas où. Et pendant que je cherchais du travail, je m’étais imaginé qu’il fallait que je trouve une solution de secours si je ne trouvais rien. La vie est trop chère pour rester à attendre ici sans rien faire. Alors je me suis imaginé un petit parcours en Amérique du sud. Et maintenant que je me suis fait à l’idée, j’y tiens, c’est bête. Donc c’est certain maintenant, j’irais en Amérique du Sud. Pour faire le bilan technique sur mon petit séjour dans cet archipel, je me rends compte que le fait de s’arrêter un peu pour travailler, de mettre en mode pause le tour du monde, ça peut paraître un peu décevant au début, mais en fin de compte ça s’inscrit bien dedans. C’est un peu différent, la routine s’installe mais je gagne en sécurité, ça repose. Je retrouve un doux foyer, un chat qui me fait des câlins quand je rentre du travail, une cuisine pour se faire de la bonne popote. Aussi, je vois plus souvent les mêmes têtes mais je peux approfondir plus longuement la connaissance des gens que je côtoie, leurs psychologies, leurs modes de vie ainsi que les conditions de vies locales, leurs histoire, leurs cultures. Et les gens ici sont vraiment attachants, sympathiques et accueillants. Pour finir, je peut mettre une ligne de plus dont je peut être fier dans mon CV. C’est sûr, mon séjour à St-Pierre restera un grand et beau souvenir de mon tour du monde, en plus d’avoir été utile. J’espère que j’aurais à nouveau l’occasion de faire d’autres « pauses-travail » aussi positives ailleurs, sur mon trajet. En Guyane, prochainement, peut-être.   Pour être plus précis pour la suite, j’empruntais chaque semaine un guide de voyage à la bibliothèque et je me suis planifié grossièrement mon périple : descente de l’Amérique du Nord par la côte Est jusqu’à Miami, puis la Jamaïque, un petit passage en Guadeloupe, le Brésil, l’Argentine, le Chili, la Bolivie, le Pérou, peut-être l’Equateur, la Colombie et le Vénézuela, puis direction la Guyane française pour travailler un peu à nouveau, si possible, avant de repartir vers Cuba et le Mexique. Du coup, je zappe l’hiver de l’hémisphère Nord pour aller le passer dans l’été de l’hémisphère Sud et des caraïbes. Ça me semble être un bon plan B. Et ça, c’est maintenant ! ON THE ROAD AGAIN !!!


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