Buenos Aires
du 31-08-2012 au 26-07-2012
Quand j’ai poussé la première fois la porte de l’hôtel St-Nicholas, de passage à Buenos Aires pour trois ou quatre jours seulement, je m’imaginais pas du tout que j’allais y revenir aussi souvent par la suite. Et quand j’ai croisé le premier jour le regard de Juliana assisse derrière le bureau de la réception de l’hôtel, j’aurais pas imaginé non plus qu’on allait vivre ensemble plus de quatre mois. Elle m’a offert un grand sourire, est venue me parler, j’ai écouté attentivement, j’ai souri, j’ai dit « Ah », j’avais pas compris grand chose à ce qu’elle avait voulu me dire, mais je venais de me décider à faire des efforts en espagnol. C’était l’anniversaire de Tatiana, la petite amie de Manu, deux argentins de la province qui font des études de danse à Buenos Aires. On passe la soirée à parler ensemble, écouter de la musique, et tout va très vite. Par la suite on passe du très bon temps ensemble, on va à un concert de percussions, on visite le musée des beaux-arts, et après mon départ pour le grand sud je décide de revenir à Buenos Aires pour faire une pause dans mon voyage et travailler un peu. L’idée était de tenter de m’insinuer plus longuement dans ce pays d’une autre culture, qui parle une autre langue, et aussi plus personnellement d’essayer de partager ma vie avec ce petit bout de femme au caractère bien épicé, au regard intense et au sourire rempli de soleil. Je me suis dit que c’était assez dingue, et ce serait certainement assez difficile, mais pourquoi pas essayer. Et puis après tout, comme dit l’homme mystérieux de Liniers, un dessinateur argentin de bandes dessinées : Toutes les décisions qu’on peut prendre …et pourtant sans aucun doute il n’y a qu’un seul futur.
Bref, pendant un long mois on vacille, on passe de l’hôtel à l’appartement de Manu et Tatiana qui sont parti en vacances, on retourne à l’hôtel parce qu’on a toujours pas trouvé d’appartement, mes quelques demandes pour trouver du travail n’aboutissent pas. C’est parfois difficile, moi j’ai encore du mal à me sortir du voyage et me concentrer sur les recherches d’emploi, alors on a du mal a y croire, et vu qu’on commence un peu a s’attacher l’un à l’autre, on a peur du déroulement, du coup c’est assez tendu. À un moment je craque, je suis sur le point de décider de repartir quand j’obtiens un entretien d’embauche, ça a l’air un peu bizarre, et faut dire aussi que je ne comprends pas tout non plus à ce qu’on se dit pendant l’entretien, mais je décide d’essayer, c’est tout ce que j’ai. Dans le même temps on trouve enfin un appartement correct, on se dit ok, le vendredi on emménage et le lundi qui suit je commence mon nouveau travail. Après un mois d’attente sans vraiment y croire, en un court week-end je deviens un authentique porteños, avec maison, femme et travail. (les porteños sont les habitants de Buenos Aires)
Et voilà que je m’enfonce moi aussi petit à petit dans le quotidien de cette grande ville, la deuxième plus peuplée d’amérique latine après Sao Paulo au Brésil, environ 3 millions d’habitants sans compter la banlieue, Paris intra-muros en compte 2,2 millions (chiffres wikipédia de 2009). Alors ma première vision ensoleillée de touriste vient à s’effacer peu à peu avec l’automne qui commence pour voir apparaître une machine énorme à manger des Hommes, mal entretenue, qui grince, qui s’use lentement et se rafistole, qui fonctionne d’elle-même nourrie par l’inertie de routine de ses millions de gens blasés qui courent dans les rues, se consacrent à leurs ouvrages, s’enfoncent dans les magasins, rentrent à la maison le soir, dorment, et recommencent le lendemain. Ma première vision exotique d’une architecture mêlée de différentes inspirations européennes, une Paris-Madrid-Milan du nouveau monde, se focalise vers une vision de ville chaotique sale et bruyante, où contrairement aux villes européennes qui tentent de garder un aspect d’ensemble cohérent, de restaurer l’ancien, ici l’étude d’urbanisme est inexistante, on fait ce qu’on veut. Cette liberté a le bon côté de permettre de faire des jolies choses, créatives, comme les petites maisons que j’aime bien des quartiers de Palermo et Belgrano qui sont dans mon album photo, mais aussi les pires immondices. C’est cette ville du film argentin « Médianeras », chaotique, où les âmes humaines s’estompent au gré de l’accroissement urbain, où les habitants se croisent et ne se rencontrent pas.
Moi aussi je suis de ses gens là à présent, un petit globule en circulation dans les veines et artères, visitant différentes cellules pour y transporter de l’une à l’autre les aliments nécessaires au fonctionnement de ce grand corps étranger. Je cours d’un chantier à l’autre, en passant par mon bureau, je transporte du matériel, des informations, j’organise les tâches, je contrôle le travail réalisé, le soir je rentre dans mon bus bondé, la tête lourde, demain je recommence. Comme seule prise d’air frais un livre que j’ai trouvé dans une librairie de l’avenue Corrientes, à trois pesos (environ 50 centimes), qui décrit la vie champêtre d’un jeune homme du nord-ouest de l’Espagne.
Parfois, pour me rendre en centre ville je prends le métro de ligne A, la plus vielle du réseau, c’est ma préférée. Les wagons du métro sont tout en bois de la structure jusqu’aux sièges en passant par les fenêtres, dans les virages sa grince, on voit les panneaux et les poteaux bouger légèrement, j’adore. Aussi, dans la rue on voit souvent des cireurs de chaussures. J’ai aperçu quelquefois des gens sur des vélos sur lesquels sont posés artisanalement des moteurs type tondeuse à gazon, un peu le solex local. Les gens qui ramassent les caisses de carton pour les revendre s’aident parfois d’un cheval pour tirer la charrette. Tout ça m’as amené à penser que c’est un peu comme si je vivais dans une ville européenne 50 ou 100 ans dans le passé. Ça pourrait presque être vrai, sauf que c’est pas en noir et blanc mais en couleurs bien réelles.
Une fois, un dimanche à environ deux heures de l’après-midi, en sortant de l’hôtel où travaille Juliana pour acheter des empanadas (une sorte de toute petite pizza calzonne), je tombe sur un mec qui me demande de l’argent. Je lui répond que j’ai rien, et effectivement j’avais juste de quoi m’acheter les empanadas, il s’approche de moi et me montre sa main qui plonge dans la poche de son sac. Il me dit : donne moi ton argent ou je te tue. J’en reviens pas que ça puisse arriver en plein jour, en pleine rue, en plein centre-ville, mais effectivement c’est dimanche et la police n’est pas très présente, quasiment tous les commerces sont fermés et les gens restent chez eux, alors il n’y a quasiment aucun témoins. Je vois bien que sa main dans son sac tient une arme à feu, mais je suis quasiment certain que c’est une fausse, alors bien sûr la situation ne me plait pas, et je finis par lui dire de me lâcher d’une manière irritée et je m’en vais. Des témoignages que recueille Juliana des touristes de l’hôtel, je suis pas le seul à avoir vécu ce genre de choses, c’est assez courant, et c’est souvent bien pire que ça. Ici, même les locaux portent très souvent leurs sacs non sur le dos mais sur le ventre pour l’avoir à l’oeil, dans les restaurants ils gardent toujours un pied de chaise dans une bretelle ou quelque chose pour le bloquer. Une fois un soir en semaine en rentrant chez moi, je rentre dans un métro et il ne part pas. Peu après j’apprends l’histoire, c’est un gars qui a volé le téléphone d’une fille et qui ne veut pas lui rendre, ils sont tous les deux dans le métro et aucun des deux ne veut lâcher l’affaire, le métro ne peut pas repartir avant que l’affaire soit réglée. Le problème est que pour régler l’affaire il y a besoin d’un policier. Ils ont dû recevoir un paquet d’appels, en plus du service du métro, le métro était bondé et tout le monde voulait rentrer chez soi. On a attendu une longue demi heure et avancé d’une station afin qu’un policier, un seul, arrive enfin, tout le monde a applaudi. Pour dire qu’en une demi-heure il y a le temps de t’arriver pas mal de choses ici avant qu’un policier arrive. Pour la petite histoire, tous disaient que c’était l’homme le voleur, apparemment ce serait la fille qui aurait fait semblant d’être volée pour que l’homme lui donne son portable, pas con vu que ça a failli marcher, elle serait bien connue de la police, comme quoi !
En fin de compte le travail n’est pas si compliqué, plus architectural que technique, plus organisationnel que négociationnel, ce qui me pèse le plus, bien entendu, c’est la langue. Bien évidemment ça finit par rentrer, faut dire aussi que j’ai pas d’autres choix, au travail ou la maison, pas de répit, c’est tout en espagnol. Mon but était au minimum de pouvoir parler l’espagnol comme je parle l’anglais, c’est à dire pas forcément d’une manière parfaite, mais au moins de ne pas avoir à réfléchir quand je veux dire un truc, que ce soit naturel, et avoir suffisamment de vocabulaire pour pouvoir me faire comprendre, même si parfois je dois faire des phrases plus longues parce qu’il me manque un mot. Bref, techniquement, je me suis rendu compte que j’ai atteint ce niveau en un peu moins de trois mois. Avec des bonnes bases au départ, une immersion totale, une langue qui n’est pas non plus trop différente de ma langue natale, ça s’est bizarrement « débloqué » un beau jour, ou plutôt au court d’une semaine, au bout de trois mois. C’est pas tant que ça en fin compte quand on considère toutes les portes que ça ouvrent, pour moi directement pour la suite de mon voyage, et aussi pourquoi pas un jour aller vivre en Espagne par exemple. Et puis c’est assez drôle, je m’étais habitué en voyageant à ne rien comprendre à ce que se disent les gens autour de moi, et quand je commence à voler au passage quelques brides de discussions personnelles dans la rue ou dans les bus, ça me fait bizarre. Une fois je passe devant un groupe de casserolistes qui font du bruit dans la rue pour protester contre l’inflation et j’entends une vieille lancer un « Retourne dans ta cuisine, eh sale cloche ! », c’était assez drôle.
A contrario, l’immersion totale a aussi de mauvais effets, en reparlant anglais avec des amis que j’avais rencontrés lors de mon voyage, je me rends compte que j’utilise des mots espagnols sans m’en rendre compte. De la même manière, un jour au travail je rencontre le chargé de l’immeuble d’un de mes chantiers car il y a eu un accident avec un extincteur qui s’est ouvert quand on montait nos meubles. En parlant du problème on se rends compte qu’on est tout les deux français, pourquoi pas parler en français alors (!), sauf que bêtement sur le moment aucun de nous deux ne se souvenait du mot français pour extincteur, ni pour femme de ménage, etc., c’est trop bête, on est bloqué pour régler le problème dans notre langue maternelle…
Du coup cette expérience à Buenos Aires m’a aussi beaucoup plu car j’ai rencontré et échangé avec des gens que je n’aurais certainement jamais rencontrés en tant que touriste, les ouvriers sur les chantiers et tous les gens qui touchent à mon travail en général. On échange des points de vue, on fait la comparaison de la vie en France et ici. Bien entendu on fait surtout la comparaison économique, et ce que je leur réponds c’est que finalement j’ai à peu près le même niveau de vie ici que celui que j’avais en France. C’est vrai qu’au final, j’ai beau vivre dans le tiers-monde, je ne vois pas beaucoup de différences. C’est vrai aussi que j’ai un bon salaire, peut-être 50% plus élevé que le salaire ouvrier, mais en transformant en euros ça donne moins de 900€ mensuels, c’est à dire, en France, pas beaucoup. La seule vraie différence, c’est qu’en ayant un travail et un niveau de vie similaire, un français en Argentine est plutôt riche, un argentin en France est plutôt pauvre, mais chacun dans son pays sont égaux. Il y a ici les mêmes habits de marques ou de modes, les mêmes smartphones, les mêmes voitures, tout est pareil. Certainement que l’écart entre riches et pauvres est beaucoup plus important ici qu’en France, car il y a quand même une pauvreté importante et vraiment déplorable, mais la classe moyenne reste semblable.
Évidemment ce thème vaudrait le coup d’être beaucoup plus approfondi, je ne peux que dire ce que j’ai vu et vécu, mais à travers de mes discussions avec les locaux, je me suis rendu compte aussi de certaines autres choses. Pour commencer, les gens ici ne pensent pas vraiment beaucoup à l’avenir. Déjà avec l’inflation incontrôlée, on me parle d’un temps où le pesos était égal au dollar US, aujourd’hui un dollar US vaut environ 4,5 pesos. On me parle de prix qui doublent en un rien de temps. On me dit souvent qu’ici les gens survivent plus qu’ils ne vivent, c’est vrai que j’ai jamais pu trop savoir comment se passent les histoires de retraites ou ce genre de choses par exemple. La politique est aussi assez brutale, on prend des décisions opposées d’un moment à l’autre en fonction des nécessités. Dernièrement ils ont interdit le change de toutes monnaies étrangères dans le pays, alors qu’avant les gens achetaient leurs maisons avec des dollars US, beaucoup d’appartements se louent en dollar US aussi, et les comptes en banques se font souvent de même en dollar. D’ailleurs, maintenant que je dois quitter le pays, mes maigres économies vont très vite maigrir car je suis obligé de changer mes pesos argentins au Chili, où le taux de change du pesos argentin est très bas, d’après mes calculs, sur mes 6000 pesos que j’ai pu mettre de côté je perd environ 1700 pesos, presque 1/3, soit 295€, c’est assez râlant. Et c’est surtout absurde, il m’est impossible en tant qu’européen d’acheter un misérable euro dans ce pays.
Aussi on dénonce ici encore plus qu’en France une classe politique corrompue et qui ne pense qu’à l’argent. Du coup les gens ne s’y confient pas trop et ne se conforment pas non plus à la loi quand ils le peuvent, tout ça dans un pays où le vote est obligatoire. Je crois qu’on m’a dit qu’un pourcentage ridicule des habitants de Buenos Aires, du genre 5% seulement, payent leurs impôts fonciers. Beaucoup de gens travaillent au noir, tout comme moi d’ailleurs, tout comme mon patron aussi. Pour finir, j’ai cru remarquer un trait particulier très important du caractère argentin que je me vois confirmer quand la maîtresse d’école de Mafalda demande pendant un cours sur l’agriculture quel est ce que le sol argentin produit en plus grande quantité. Mafalda répond : des pessimistes. Elle rentre chez elle en disant à ses parents qu’aujourd’hui à l’école elle a reçu un zéro en sincérité. (Mafalda est l’héroïne d’une bande dessinée signée par Quino, parfois seulement drôle et tendre mais aussi souvent très contestataire pour son époque, c’est cultissime en Argentine, et moi aussi personnellement j’adore.)
En parlant de produit du sol, je peux enfin approfondir mon opinion sur le vin argentin. J’ai eu l’occasion de goûter quelques vins d’un prix déjà plus élevé et, effectivement, ils sont vraiment pas mauvais. Bizarrement ma meilleure surprise fut un vin d’un prix raisonnable, qui n’était pas extraordinaire mais avait une saveur vraiment particulière, très fruité en tirant sur le cassis, les autres de plus haute qualité sont très proches des vins français, bien équilibrés, puissants, mais il me paraît qu’ils manquent d’originalité. Ce qui me plait dans le vin en France est la découverte chaque fois d’une œuvre différente, ici ils sont très semblables les uns aux autres. Entre autres produits, la viande est effectivement très bonne, le poulet surtout m’a semblé beaucoup plus savoureux qu’en France, j’ai redécouvert l’odeur de l’huile d’olive en faisant revenir un oignon sur la poêle, je suis devenu accro au dulce de leche, une sorte de confiture de lait. La première chose qu’on fait en général c’est de le goûter tartiné sur du pain, mais on trouve toujours plein de trucs nouveaux, à mélanger dans le riz au lait par exemple, sinon dans les boulangeries-pâtisseries ils s’en servent pour garnir un croissant ou un beignet, il existe une saveur dulce de leche pour les danettes, c’est une tuerie. Enfin on ne peut pas parler des saveurs argentines sans aborder le sujet du maté. Ici le maté c’est partout et tout le temps, on voit souvent des gens le prendre dans la rue, entre amis, mais aussi les employés des magasins le prennent pendant la pause, on m’en a souvent proposé sur les chantiers. C’est un peu le calumet de la paix local, quand on te le propose c’est que tu fais partie du cercle, ça fait plaisir, c’est aussi le moment pour discuter un peu.
Buenos Aires m’avait beaucoup attiré pour l’aspect culturel. J’avais remarqué beaucoup de théâtres, de librairies, finalement ce avec quoi j’ai le plus accroché c’est le cinéma. Déjà parce qu’il y a l’Incaa, le cinéma en face de la place du congrès, à 8 pesos l’entrée (environ 1,5€), qui sert des films locaux régulièrement, plus ou moins extraordinaires et aux budgets visiblement assez bas, mais toujours très originaux, variés et intéressants. Je commence par découvrir Nosotras sin mamá, un film qui se déroule entièrement dans une seule maison, mais où la subtilité des personnalités des trois sœurs qui se retrouvent après la perte de leur mère s’exprime d’une manière très profonde. Tiempos menos modernos, un gaucho argentin (les gauchos sont ici l’équivalent des cow-boys aux USA) perdu dans la Patagonie déserte, qui découvre la télévision et devient accro, assez drôle et surtout très touchant. Elefante Blanco, la méga production argentine, cette fois un budget autrement plus élevé, l’histoire traite grosso modo de la vie dans la villa misere (les favelas argentine), ça se déroule grossièrement comme un film type hollywoodien et ça finit en réservoir dog, tout le monde se tire dessus, c’est assez classique quoi, l’intérêt réside surtout dans la réalité locale qui est décrite. El ultimo Elvis, un film assez sympathique qui décrit la vie d’un imitateur argentin d’Elvis Presley. Abrir puertas y ventanas, très proche du style de Nosotras sin mamá, mais avec une recherche plus approfondie dans le décor et les plans. Pompeya, un film de gangster surviolent, un peu maladroit dans la prise de vue, mais à la narration assez fraîche et originale. À côté de ça je découvre aussi et surtout Medianeras, une sorte d’Amélie Poulain argentin pour le type de narration comme pour le contenu et la musique originale, qui se focalise plus sur la qualité de vie dans la ville de Buenos Aires et les perspectives d’avenir d’un citoyen moyen, sur la trame d’une histoire d’amour de deux personnes qui se croisent sans arrêt sans se rencontrer, sauf au dernier moment du film bien sûr (Merdeuh, fallait pas le direuh !). Bref, à part pour Medianeras et Elefante Blanco, ce sont des films qui sortent difficilement de leurs pays d’origine mais qui ont pour moi justement beaucoup de valeur pour leur aspect typique.
Bon, là j’ai pas trouvé de transition…
Une âme si forte qui se protège derrière une carapace si épaisse, c’est certain que ça cache un cœur trop sensible. Un petit cœur que j’ai appris à connaître au cours de ses quatre mois, j’en avais pas encore parlé mais c’est certain que c’est la partie la plus importante de mon séjour ici. Une petite femme qui n’a pas eu une enfance facile, une âme tourmentée qui se cache dans le grand Buenos Aires loin de son pays natal la Colombie, pour fuir ses fantômes. On a partagé nos vies durant tout ce temps, c’est une richesse inestimable pour moi d’avoir été mêlée à elle. Derrière sa malchance chronique et sa vie sans plans de sortie, elle a su peindre un tableau plein de couleurs dans son caractère enflammé que j’ai voulu laisser déborder en moi, j’en ressors tout coloré. Une grande enfant assez faussement rebelle qui n’attend que de pouvoir offrir son amour débordant à celui qui le vaut, je suis fier de l’avoir valu mais plus que désolé de pas pouvoir lui donner ce dont elle a besoin. Un voyageur de passage qui ne tient pas en place et trop jeune pour se lancer dans des longs plans d’avenir, aujourd’hui je me dis que c’était vraiment stupide de lui proposer de vivre ensemble quelques mois et se quitter ensuite. C’était la première fois pour moi que je me lançais dans une relation de ce type et j’avoue, j’ai honte, la première fois qu’elle m’a dit qu’elle m’aimait j’ai eu peur. Bien entendu, je ressens aussi très fort cette chose que j’ai encore du mal à dire par pudeur et que pour pas la prononcer je lui répondais : beaucoup plus que toi. De ses souvenirs d’enfance et de jeunesse qu’elle me contait, je me suis efforcé de les imaginer avec le plus de réalité possible pour pouvoir les garder comme si c’étaient les miens, et après avoir vécu quatre mois comme une seule personne, je me sépare aujourd’hui d’une partie de moi-même. Après avoir dormi quatre mois ensemble collé l’un contre l’autre, j’attaque demain ma première nuit tout seul dans un bus quelconque, ça être triste. Heureusement, on se revoit en Colombie car elle rentre finalement au pays pour possiblement trouver une situation meilleure, mais une chose est certaine, je garderais toujours un bout d’elle en moi, elle qui n’a jamais pu vraiment voyager comme elle le voulait, ce petit bout d’elle voyagera avec moi.
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